La « spatialisation » des messages

Un énorme bouleversement est en cours. Le support des textes et des images est en train de disparaître : le papier, les tirages photos sont progressivement remplacés par les écrans, qui sont eux-mêmes voués à s’effacer pour des dispositifs de réalité augmentée encore encombrants mais pour lesquels des entreprises travaillent déjà la miniaturisation à la dimension de lentilles de contact.
On parle de « dématérialisation du support » et ce qui se joue, là, en ce moment, derrière, c’est la « mise en espace »,

la « spatialisation » générale de tous les messages humains, textes comme images.

Leur présentation sera en volume, en réalité augmentée, dans l’espace autour de nous (comme le son qui, lui, est spatialisé depuis toujours).
Cette spatialisation est en chemin. Sa généralisation est pour bientôt.

Il n’y a aucune raison qu’elle ne concerne pas également la production artistique picturale et sculpturale.

Si l’architecture peut se faire (et se fait) avec des logiciels 3D, si la plupart des objets que nous utilisons sont aujourd’hui conçus avec ces mêmes logiciels 3D, si l’on peut concevoir nos espaces de vie et tous les objets avec lesquels nous interagissons dans des écrans, rien ne justifie qu’on ne puisse en faire de même avec la sculpture.

Il est urgent de commencer à s’habituer à cette mutation et, pour le graphiste et le plasticien, de réfléchir sa production en fonction d’elle.
En forçant le trait, on pourrait dire « Adieu peinture, adieu mise en page, bonjour sculpture ! »

D’abord le papier et la toile perdent leur monopole pour l’écran, puis l’écran lui-même va s’effacer. Voir à ce sujet mon article La fin de l’image.
L’écran représentait déjà la fin du support définitif (un support, certes, mais impermanent, un « dispositif diffuseur », comme il en existe de nombreux pour le son). Mais il n’est qu’une étape et est amené à se dématérialiser lui aussi.